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La semaine du droit de la famille

Civil - Personnes et famille/patrimoine
09/11/2020
Présentation des dispositifs des derniers arrêts publiés au Bulletin civil de la Cour de cassation, en droit de la famille.
GPA – adoption par l'époux du père de l'enfant né à l'étranger
« Selon l’arrêt attaqué (Paris, 26 février 2019), l’enfant B... Y... est né le [...] à Villahermosa (Etat de Tabasco, Mexique) de M. Y.... Celui-ci, né le [...] à Tarbes, de nationalité française, a eu recours à une convention de gestation pour autrui au Mexique. La transcription de l’acte de naissance établi à l’étranger ne mentionne que le nom du père.
Par requête du 11 juillet 2016, M. X..., né le [...] à Guayaquil (Equateur), de nationalité française, époux de M. Y..., a formé une demande d’adoption plénière de l’enfant de son conjoint. M. Y... a consenti à cette adoption le 4 mai 2016.
(…) Vu les articles 16-7, 353, alinéa 1er, 345-1, 1°, et 47 du Code civil :
Aux termes du premier de ces textes, toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui est nulle, l’article 16-9 du même code précisant que cette disposition est d’ordre public.
Selon le deuxième, l’adoption est prononcée à la requête de l’adoptant par le tribunal judiciaire qui vérifie si les conditions de la loi sont remplies et si l’adoption est conforme à l’intérêt de l’enfant.
Aux termes du troisième, l’adoption plénière de l’enfant du conjoint est permise lorsque l’enfant n’a de filiation légalement établie qu’à l’égard de ce conjoint.
Aux termes du quatrième, tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.
Il résulte de ces textes que le droit français n’interdit pas le prononcé de l’adoption, par l’époux du père, de l’enfant né à l’étranger de cette procréation lorsque le droit étranger autorise la convention de gestation pour autrui et que l’acte de naissance de l’enfant, qui ne fait mention que d’un parent, a été dressé conformément à la législation étrangère, en l’absence de tout élément de fraude.
Pour rejeter la demande d’adoption plénière, l’arrêt retient que rien ne permet d’appréhender les modalités selon lesquelles la femme ayant accouché de B... aurait renoncé de manière définitive à l’établissement de la filiation maternelle et qu’il en est de même du consentement de cette femme à l’adoption de l’enfant, par le mari du père. Il estime que, dans ces conditions, il ne peut être conclu que l’adoption sollicitée, exclusivement en la forme plénière et avec les effets définitifs qui s’attachent à cette dernière, soit conforme à l’intérêt de l’enfant, qui ne peut s’apprécier qu’au vu d’éléments biographiques suffisants.
En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les documents produits, et notamment l’autorisation donnée le 10 décembre 2015, par la direction générale du registre civil, à l’officier de l’état civil de la commune de Centro (Etat de Tabasco) afin qu’il établisse l’acte de naissance de l’enfant, ne démontraient pas que cet acte de naissance, comportant le seul nom du père, était conforme à la loi de l’Etat de Tabasco, de sorte qu’en l’absence de lien de filiation établi avec la femme ayant donné naissance à l’enfant, l’adoption plénière était juridiquement possible, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ».
Cass. 1re., 4 nov. 2020, n° 19-15.739, P+B+I*
 

GPA – adoption par l’époux du père de l'enfant né à l'étranger
« Selon l’arrêt attaqué (Paris, 14 mai 2019), B... Y... est né le [...] à Bombay (Inde) de M. Y..., de nationalité française. L’acte de naissance indien de l’enfant n’indique aucune filiation maternelle. Le 18 octobre 2012, M. Y... a reconnu l’enfant devant l’officier de l’état civil de la ville de Paris (11e arrondissement). Le 15 décembre 2015, l’acte de naissance a été transcrit par le consul général de France à Bombay. Le 18 mars 2016, M. Y... a épousé M. X..., de nationalité française, devant l’officier de l’état civil de la ville de Paris (11e arrondissement).
 Par requête du 26 juillet 2016, M. X... a formé une demande d’adoption plénière de l’enfant B....
 
(…) Aux termes de l’article 16-7 du Code civil, toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui est nulle, ces dispositions étant d’ordre public.
Cependant, le recours à la gestation pour autrui à l’étranger ne fait pas, en lui-même, obstacle au prononcé de l’adoption, par l’époux du père, de l’enfant né de cette procréation, si les conditions légales de l’adoption sont réunies et si elle est conforme à l’intérêt de l’enfant.
Aux termes de l’article 370-3 du code civil, les conditions de l’adoption sont soumises à la loi nationale de l’adoptant.
Aux termes de l’article 345-1, 1°, du même code, l’adoption plénière de l’enfant du conjoint est permise lorsque l’enfant n’a de filiation légalement établie qu’à l’égard de ce conjoint.
Aux termes de l’article 47 du même code, tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.
L’arrêt en déduit exactement que le droit français n’interdit pas le prononcé de l’adoption par l’époux du père de l’enfant né à l’étranger de cette procréation lorsque le droit étranger autorise la convention de gestation pour autrui et que l’acte de naissance de l’enfant, qui ne fait mention que d’un parent, a été dressé conformément à la législation étrangère, en l’absence de tout élément de fraude.
Il relève que le recours à la gestation pour autrui par des étrangers, y compris célibataires non résidents, demeurait possible en Inde lors de la conception en 2010 et de la naissance en 2011 de l’enfant, ce que ne conteste pas le procureur général, qui ne critique que la légalité, au regard du droit indien, de l’établissement de l’acte de naissance de l’enfant, lequel ne fait état que de la filiation paternelle de M. Y... à l’exclusion de toute filiation maternelle.
Il ajoute que, si les dispositions de l’article 19 b de la loi indienne de 1886 et de l’article 29 de la loi indienne du 31 mai 1969 n’autorisent pas l’établissement ou l’enregistrement d’un acte de naissance d’un enfant né hors mariage avec la mention d’un père sans celle de la mère, il ressort du guide des bonnes pratiques rédigé en 2005 par le Conseil indien de la recherche médicale et du projet de loi sur les technologies reproductives assistées (ART) de 2008, révisé en 2010, que la situation des enfants nés d’une gestation pour autrui était régie par ces textes, les projets de loi ART de 2008 et de 2010 servant, dans l’attente de leur adoption définitive et de leur promulgation, de lignes directrices pour l’établissement des actes de naissance des enfants nés selon cette méthode d’assistance médicale à la procréation. Il constate que l’application de ces derniers textes par les juridictions indiennes est confirmée par la décision rendue le 18 novembre 2011 par la Cour de district de Delhi et relève que, selon l’article 35 du projet de loi ART de 2010, « dans le cas d’une femme célibataire, l’enfant sera l’enfant légitime de la femme, et dans le cas d’un homme seul, l’enfant sera l’enfant légitime de l’homme » et que « l’acte de naissance d’un enfant né grâce à l’aide à la procréation assistée doit contenir le nom du ou des parents, selon le cas, qui a demandé une telle utilisation ».
Il relève encore que la possibilité de dresser un acte de naissance ou d’enregistrer une naissance en ne faisant mention que de la filiation du père sans celle de la femme ayant accouché est confirmée par la directive adressée le 16 septembre 2011 par le directeur adjoint des services de santé de l’État du Maharashtra au directeur adjoint du service de santé de l’hôpital de Naidu selon laquelle dans le cas de parents d’intention célibataires les certificats doivent être émis en mentionnant leurs noms, qui peut être la mère ou le père mentionnant inconnu pour l’autre nom.
Il précise que le procureur général ne saurait se fonder sur les dispositions du projet de loi indienne sur les technologies reproductives assistées de 2014, qui n’était pas applicable au jour de l’établissement de l’acte de naissance de l’enfant, et dont il ne soutient pas que ses dispositions seraient rétroactives.
Il en déduit que l’acte de naissance de l’enfant, qui mentionne comme père M. Y... sans faire mention de la gestatrice, a été établi conformément aux dispositions de la législation indienne et qu’il ne saurait donc être reproché au requérant un détournement ou une fraude.
Il relève enfin que MM. X... et Y... versent aux débats le contrat de gestation pour autrui conclu le 29 octobre 2010 entre M. Y..., d’une part, Mme C... Z... et son époux, d’autre part.
De ces constatations et énonciations, la cour d’appel a exactement déduit que l’acte de naissance de l’enfant avait été régulièrement dressé en application de la loi indienne et qu’en l’absence de filiation maternelle établie en Inde, l’adoption d’B... par M. X... était légalement possible.
Le moyen n’est donc pas fondé
 »
Cass. 1re., 4 nov. 2020, n° 19-50.042, P+B+I*

Jugement supplétif – acte de naissance
« Selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 février 2019), Monsieur X, originaire du Bénin où il est né en 1997, a introduit une action déclaratoire de nationalité fondée sur son lien de filiation paternelle et la double naissance en France de son père et de son grand-père.
(…) Après avoir retenu que le jugement supplétif d'acte de naissance produit par Monsieur X pour justifier du lieu de naissance de son grand-père paternel ne remplit pas les conditions exigées par la convention franco-béninoise relatives à la reconnaissance des décisions rendues en matière civile au Bénin, l'arrêt énonce exactement que ni les actes de mariage et de décès du grand-père, ni les actes de naissance de ses enfants, ni son livret catholique ne sont de nature à suppléer l'absence de tout acte de naissance probant au sens de l'article 47 du Code civil.
Le moyen n'est donc pas fondé »
Cass. 1re., 4 nov. 2020, n° 19-18.280, P+B*
 

Le lien vers la référence documentaire sera actif à partir du 9 décembre 2020
 
 
 
 
 
 
 
Source : Actualités du droit